1. Vous l’avez annoncé sur votre site Web : vous êtes solidaire des Palestiniens. Pourquoi ?
Comment ne pas être solidaire d’un peuple qui manque de tout, que l’on opprime depuis des décennies, que l’on martyrise, que l’on massacre à grand renfort de bombes ? Ce peuple a le droit de vivre ! Il a le droit à la paix, à la dignité. Cela commence par le droit à un Etat souverain dans les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale, avec la libération des prisonniers, avec le droit au retour pour les réfugiés, en application des résolutions de l’ONU.
2. Comment évaluez-vous la situation humanitaire à Gaza ?
Elle est catastrophique. Je ne reprendrais pas tous les chiffres. Le peuple de Gaza étouffe depuis des mois sous un blocus économique, un véritable siège, aux conséquences sociales et sanitaires terribles. Plus de 50 % des habitants de la Bande de Gaza sont au chômage. Sans eau, ni électricité, ni ravitaillement normal en denrées de base et en médicaments, la vie quotidienne est devenue un enfer. Tout le peuple palestinien, en Cisjordanie comme à Gaza, est visé par cette politique inhumaine qui accompagne un processus de colonisation permanent des terres palestiniennes, avec la construction d’un mur d’annexion qui coupe des villages, détruit des cultures, ruine des familles, et cela, dans l’indifférence quasi-générale.
3. Qui est à votre avis le premier responsable du lancement de cette guerre ?
Il est évident que la poursuite sans relâche de la colonisation, le refus d’Israël d’appliquer les résolutions de l’ONU et le droit international ont enterré toutes les tentatives de règlement du conflit. La responsabilité israélienne dans l’impasse politique et dans la crise tragique d’aujourd’hui est déterminante. Néanmoins, je dénonce également les tirs de roquettes sur Israël. Sans solution durable et juste à ce conflit, il n’y aura pas de paix dans la région.
4. Croyez-vous que le Gouvernement et le Président français ont fait tout ce qu’ils pouvaient pour arriver à un cessez-le-feu ? Si non, est ce que cela signifie qu’ils sont complices de l’administration israélienne ?
Les dirigeants français et européens se contentent d’un appel à un cessez-le-feu et à un retour au processus de paix. En agissant ainsi, les 27 veulent faire oublier, précisément, qu’il n’y a plus de processus de paix, ni dans le cadre engagé hier à Oslo, ni dans celui d’Annapolis ! C’est ce que les 27 choisissent de surtout ne pas voir. Sous la présidence française, ils se sont même permis d’encourager Israël en rehaussant son statut privilégié dans le cadre de l’accord négociation U.E.-Israël ! La complaisance des Européens vis-à-vis de la politique d’occupation et de colonisation israélienne est consternante. Elle entretient l’impunité d’Israël et aggrave les causes du conflit israélo-palestinien. Des sanctions sur Israël peuvent faire avancer une perspective de paix fondée sur le respect du droit international. L’accord d’association avec Israël est un outil dont dispose l’Europe pour exercer cette pression nécessaire, comme l’envoi de troupes sous mandat de l’ONU sur place pour assurer la sécurité.
5. On parle beaucoup du plan du Président français de « l’Union Pour La Méditerranée ». Comment voyez-vous ce projet ? Est-ce qu’il peut amener des bonnes nouvelles pour le Moyen-Orient ?
Il ne peut y avoir de perspective positive pour les échanges, au sens large, en Méditerranée sans l’affirmation et le respect concret de valeurs démocratiques communes et des règles élémentaires d’un Etat de droit. Cela manque cruellement au projet d’Union méditerranéenne. De plus, cette Union reposerait sur une zone de libre-échange très néo-libérale, déjà instituée en 1995 dans le cadre du « partenariat » euro-méditerranéen. Or de graves révoltes populaires de la faim dans les 3 pays du Maghreb ont montré les dégâts sociaux provoqués par les politiques conduites dans ces pays et d’un partenariat qui n’a fait qu’accentuer les fragilités économiques et sociales existantes. Il est extrêmement préoccupant que le projet d’Union pour la Méditerranée ne tienne aucun compte, réellement, de ces faits. Enfin, il ne peut y avoir d’Union en dehors des peuples eux-mêmes. Voyez en Europe : les Européens construisent à la fois une Europe de libre circulation pour les capitaux et les marchandises et une Europe fermée aux migrants, qui se voient criminalisés, réprimés et refoulés. C’est l’Union de la finance, des forces de l’argent, ce qui est très loin de l’intérêt des populations. Tout cela me fait penser que l’Union pour la Méditerranée de Nicolas Sarkozy est mal partie. L’exigence démocratique, de coopérations mutuellement avantageuses, la garantie des libertés, l’arrêt des répressions, la libération de tous les prisonniers politiques en Tunisie, en Syrie notamment, doivent figurer en tête des discussions. 6. Êtes-vous au courant de la situation politique au Liban ? Si oui, comment voyez-vous le futur de la démocratie libanaise et quels sont les obstacles à franchir ?
On parle effectivement moins du Liban. J’avoue ne pas être un grand spécialiste de la question, même si les tensions vont inévitablement ressurgir, ce qui a déjà commencé. Là-bas aussi, la fin des hostilités ne doit pas être qu’une parenthèse. Il faut s’attaquer aux causes véritables de la crise et des impasses d’aujourd’hui. Le Liban doit être aidé dans sa reconstruction et pour l’affirmation d’un Etat de droit indépendant, démocratique et non confessionnel, où seuls les pouvoirs publics disposent de la force armée. Cela doit être le résultat d’un consensus politique inter-libanais et ne peut pas être imposé par la force, sauf à risquer de réunir les conditions d’une déstabilisation et de vives confrontations internes. Je suis membre du Parti Communiste Français, parti qui a toujours été du côté de la paix, de la démilitarisation, de la souveraineté, de la démocratie, contre l’oppression des peuples et leur asservissement. La force ne résout rien, au contraire ! Ce que l’on peut dire, c’est que le « nouveau Moyen-Orient » qu’appelaient de leurs voeux les dirigeants américains et israéliens ressemble de plus en plus, au vu de l’évolution dramatique de la situation, à un tapis de ruines et à un déferlement de violences aveugles.